L’Arabie Saoudite est à ce jour l’un des pays les plus polluants de la planète. Pourtant, le royaume s’est engagé à prendre des mesures radicales, espérant même atteindre une neutralité carbone d’ici moins de 40 ans.
C’est dans cette optique que l’Arabie Saoudite développe un projet architectural sans précédent : une véritable mégalopole tout aussi futuriste qu’écologique, qui devrait voir le jour d’ici moins d’une décennie.
Retour sur ce projet révolutionnaire, nommé « The Line », qui pourrait bien faire naître un nouveau modèle de ville, et bouleverser les codes de l’urbanisme.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que le projet « The line » n’envisage pas les choses comme tout le monde.
Pour comprendre en quoi consiste ce projet architectural, imaginez une bande longue de près de 170 kilomètres, traversant le désert à proximité de la Jordanie, de l’Égypte et d’Israël. Visualisez que cette bande serait parfaitement continue, haute de plus de 500 mètres et entièrement recouverte de miroirs.
Cette image mentale vous semble insensée ? C’est pourtant le projet de ville que souhaite concrétiser le prince saoudien Mohamed Ben Salmane.
Large de seulement 200 mètres environ, cette ville pourrait accueillir plus de 9 millions d’habitants dans une structure inédite, et ainsi renouveler les codes de l’urbanisme traditionnel. Aux antipodes des villes habituelles, cette nouvelle mégapole devrait porter le nom de Neom, et permettre à l’Arabie Saoudite de réduire considérablement son empreinte carbone.
Bien entendu, les architectes du monde entier réagissent face à un tel projet.
Si certains considèrent que le projet « The Line » présente par sa radicalité, une avancée majeure dans la conception d’une grande ville, d’autres assument un avis bien plus critique.
En effet, l’idée d’entasser une si grande population entre deux larges murs en plein désert, relèvent pour certains du fantasme, et de l’irréalisable. Les détracteurs du projet dénoncent volontiers une imagerie digne du 5ème élément ou de Blade Runner, bien éloignée d’une architecture réaliste.
D’autres encore, craignent la création d’une sorte de centre commercial géant, qui proposerait une qualité de vie médiocre à des habitants coincés dans une sorte de mall aux proportions titanesques.
Mais pour les créateurs de « The Line », pas question de se laisser attaquer sur de telles thématiques : la ville sera certes futuriste, déroutante, mais offrira bel et bien tout le confort nécessaire.
La température devrait y être idéale, grâce à un système de ventilation particulièrement efficace, et la nature devrait se montrer omniprésente dans la structure.
La ville, pensée en trois dimensions, sera certes bien plus haute que la Tour Eiffel ou l’Empire State Building, mais compte gérer la circulation de l’air et de la lumière de manière inédite, pour garantir un cadre de vie agréable à ses habitants.
Toutefois, il reste un point de contestation auquel le projet The Line n’a pas encore répondu : l’emplacement de la future ville se situe sur un territoire aujourd’hui occupé par des Howeitat, une tribu comptant plus de 200 000 membres, et qui devra être expulsée lors de la réalisation du projet.
C’est bien là l’un des arguments qui rend le projet de la ville de Neom particulièrement révolutionnaire : imaginez une ville, capable de réunir autant d’habitants que le Grand Paris, sans la moindre route ou le moindre véhicule motorisé.
Car pour le prince saoudien, la voiture individuelle appartient désormais à un modèle urbain révolu.
Pour se déplacer dans cette immense « Line », quoi de mieux qu’un train à grande vitesse, permettant de traverser l’entièreté de la structure en une vingtaine de minutes seulement ?
Dans la lignée de l’Hyperloop, ce train circulera à une vitesse de 500km/h environ, grâce à une énergie propre à 100%.
Par ailleurs, un réseau de métro devrait être installé en sous-sol, pour réaliser de plus petites distances.
Toutefois, il ne sera pas nécessaire de réaliser de grands trajets au quotidien : la ville a été pensée pour que chaque habitant puisse avoir accès à tous ses besoins de première nécessité dans un rayon de 5 minutes autour de son domicile.
Le projet de la ville de Neom entend répondre à une crise écologique, mais également présenter un nouveau modèle de gestion des crises démographiques. Autrement dit, il s’agit ici de loger un nombre très important d’individus, dans une structure qui ne dépasse pas les 34 kilomètres carrés.
Toute la nouveauté réside dans la hauteur considérable de la ville, avec deux grands murs qui s’élèvent à plus de 500 mètres au-dessus du sol. Ainsi, les logements, commerces, lieux de travail, écoles ou autres centres de santé se superposent, ce qui révolutionne toute la circulation des habitants dans l’espace. Au lieu d’évoluer dans une ville « plate », chacun pourra se déplacer dans les trois dimensions de manière parfaitement fluide.
La surface au sol est donc maximisée, ce qui permet de bétonner une bien plus petite superficie. Cette superposition permet par ailleurs d’utiliser bien moins de transports. Neom entend donc résoudre la problématique de l’étalement urbain, et invite à repenser le milieu urbain d’une façon radicalement différente.
Si en 2030, la ville ne pourrait à priori accueillir qu’ 1,2 million d’habitants, sa capacité totale est estimée à 9 millions, d’ici 2045.
Notons enfin que la structure revendique une parfaite insertion dans son environnement, puisqu’elle sera délimitée par deux larges façades extérieures entièrement recouvertes de miroir.
Ainsi, la ville pourra se fondre dans le désert avec la plus grande discrétion.
Que serait une ville du futur sans une utilisation généralisée des dernières technologies ?
Le projet « The Line » entend proposer une véritable « révolution civilisationnelle », comme l’a expliqué le prince héritier lors de la présentation du projet. Une utilisation massive de l’Intelligence Artificielle (IA) est en effet envisagée au sein de la ville, ce qui devrait permettre de faciliter la vie des habitants, et d’améliorer les capacités de l’infrastructure.
Neom pourrait donc devenir un véritable prototype de « ville intelligente ». Tous les services publics jugés obsolètes seront par exemple remplacés par de l’IA. Il a même été évoqué que les enseignants pourraient dispenser leurs leçons de manière virtuelle, grâce à l’utilisation d’hologrammes.
Les premières présentations de Neom en 2017, évoquaient également la possibilité de créer une lune artificielle ainsi que des plages phosphorescentes.
Bien entendu, un tel projet représente une enveloppe considérable.
La construction d’une telle mégapole devrait coûter environ 500 milliards de dollars, une somme qui pourrait être financée par le souverain saoudien. Par le passé, l’Arabie Saoudite a déjà prouvé son désir de repousser les limites de l’urbanisme, et de présenter une société très avant-gardiste.
Le prince Mohamed Ben Salmane a ainsi apporté un soutien sans faille au projet « The Line », et aurait laissé sous-entendre que la construction avait d’ores et déjà commencé. Toutefois, l’ensemble des travaux devrait s’étaler jusqu’à 2040 ou 2045. De quoi créer plus de 380 000 emplois, et ainsi dynamiser l’économie saoudienne.
Mohammed Ben Salmane se félicite d’une telle perspective et explique que les communautés verticales « défieront désormais les villes plates et horizontales traditionnelles, et créeront un modèle pour la préservation de la nature et l’amélioration de l’habitabilité humaine ».
Reste donc à bâtir cette forteresse éco-responsable, fonctionnant entièrement à l’énergie solaire et éolienne, ainsi que l’usine d’hydrogène vert qui lui permettra d’assurer une autonomie énergétique parfaite.
Aujourd’hui encore, la faisabilité du projet dans son entièreté reste contestée.